[quête] Camp de bandits

La Louve n'aurait su dire depuis combien de temps elle avait quitté sa Calédonie natale pour les contrées du Sud. Le mode de vie y était radicalement différent, tout comme le temps. Mais elle, comme le reste de ses hommes, avait su très vite s'adapter pour le bien de l'alliance avec le royaume d'Uther. Par ailleurs aujourd'hui le roi l'avait envoyé s’enquérir d'une affaire qui tracassait le peuple un peu plus au sud de Camelot. Apparemment une bande de brigands qui causaient bien des frayeurs aux gens du coin. Pour la Princesse ce n'était qu'une mission de routine, puis que par chez elle les brigands étaient une espèce apprécié pour la chasse à l'homme. Après tout quel homme de basse extraction, avec les pieds dans la merde et la lame au poing, pouvait manqué à de pauvres paysans sans le sous ?

Athala avait fait demander à ses hommes de la retrouver dans la cour du château afin de s'y regrouper avant le départ. Sur le chemin qui menait à l'extérieur, la picte avait croisé la route du brave médecin de la cour qui lui avait demandé si son apprenti pouvait venir avec eux afin d'aller cueillir des herbes médicinales et autres denrées qui ne couraient pas par ici. La Louve avait accepté d'un simple hochement de tête avant de filer dans la cour intérieur.

Son cheval et ses hommes l'y attendaient avec patience, prêts à un peu d'action. Lance au poing, Athala descendait le grand escalier avec une mine sinistre. N'allez point croire que la nouvelle de cette quête l'avait plongé dans l'ennui, au contraire, il était de bon ton de faire comprendre qu'ils s'en allaient à la chasse. Car bien souvent le malhonnête avait été homme d'arme qui avait choisi la désertion plutôt que l'accomplissement de son devoir. Si bien qu'il n'y avait pas plus grand honneur pour les pictes que d'aller traquer les lâches et montrer combien il coûtait cher de ne pas respecter les lois et le roi. Et surtout parce que pour une fois il ne leur était pas demandé d'épargner des vies. La princesse se hissa en selle, levant le regard sur la cour pour apercevoir l'apprenti de Gaius, si tant est qu'il soit un brin ponctuel.

Le soleil de ce matin ne fit qu’embellir la journée qui ne faisait que commencée du valet du prince. Comme à son habitude, il avait réveillé Arthur de façon peu délicate et avait failli se prendre un objet par la tête – il était habitué d’esquiver depuis le temps. Après petit déjeuné, Merlin avait assisté, comme à son habitude à l’entrainement quotidien du prince, faisant rire de lui par son maître et les autres chevaliers. C’était une routine plutôt agaçante, mais à force de s’habituer, il se remettait assez rapidement de sa colère. Après tout, il n’avait pas bien le choix. Leur destin était lié, et il était beaucoup trop tard maintenant pour revenir sur sa décision de protéger son ami. Oui, son ami, car Arthur avait beau être un idiot, aveugle qui plus est, il demeurait son ami.

Mais aujourd’hui, Merlin n’était pas destiné à rester au château. Juste avant le déjeuner, Gaius entra dans ses appartements et demanda à Merlin, qui s’apprêtait à manger, de se préparer un sac rapidement pour quitter. Il voulait qu’il accompagne la princesse Athala en mission pour pouvoir lui récolter les herbes rares qu’il avait besoin, et qui ne poussait que près des côtes, sur la grande route de Portway.

« Avec la princesse picte ? Mais Gaius… »

Bien sûr, il ne put se plaindre avant que Gaius ne l’interrompt, lui disant de se dépêcher avant que la princesse et ses hommes ne quittent sans lui. Alors Merlin se prépara un sac, finissant son sandwich en même temps, et partit avec Gaius vers la cour du château. C’est en route vers l’entrée que Merlin et son tuteur firent la rencontre de la princesse. Gaius lui demanda gentiment, avec aise, de prendre Merlin avec elle pour qu’il puisse récolter les herbes qu’il avait besoin. Sans un mot, elle accepta d’un hochement de tête, de quoi faire frissonner Merlin. Il ne savait toujours pas ce qu’il pensait d’elle et de sa présence en Camelot. Certes, il avait compris à quel point ils étaient de précieux alliés, mais il ne pouvait pas s’empêcher de craindre un peu, sans avoir d’explication pour autant. Bref, une fois dans la cour, il se dépêcha à seller son cheval et quitta Camelot. Il ne put s’empêcher de remarquer à quel point il était évident à repérer parmi ses compagnons de route. Gaius, toujours dans la porte à attendre qu’il parte, fit signe de la main à Merlin, qui lui répondit avant de lever la tête pour voir Morgane à travers une fenêtre. Sans doute n’était-ce pas une bonne idée pour lui de partir, ou même pour les pictes, s’ils étaient de si bons alliés, et de laisser Camelot sans défense magique contre cette sorcière. Bref, une fois monté en selle, le signal de départ fut donné, alors ils se mirent tous en route vers la grande route de Portway.

Le serviteur du prince avait enfin daigné montrer le bout son nez dans la cour du château, sitôt en scelle, les cavaliers pictes avaient talonné leurs montures pour s'en aller au galop, les sabots battant le pavé sur leur passage, forçant les habitants à s'écarter de leur chemin. Il allait s'en dire que les gens d'ici avaient pris l'habitude de voir les nordiens aller à venir à Camelot depuis que l'alliance avait été passée. Mais aujourd'hui ils n'étaient qu'une quinzaine à prendre la clé des champs. Athala en tête, elle prenait la direction de la voie royale, celle de portway. Son cheval galopa ainsi sur deux ou trois lieux avant qu'elle ne fasse ralentir l'animal, faisant signe à Merlin de prendre son allure, laissant ainsi les hommes passer devant. Ils s'organisèrent de façon à mettre les chevaux les plus puissants à l'avant du groupe. La princesse créa un écart d'une cinquantaine de pieds de distances, prenant le temps d'observer les environs. Le reste du voyage se passerait de la même façon, le temps qu'ils trouvent les bandits. Bien qu'elle se doutait qu'ils ne chercheraient pas à attaquer des hommes d'armes, il n'y avait qu'un intérêt à le faire. Mais ne connaissant pas la position de ces probables déserteurs, ils allaient certainement devoir chercher des pistes et traquer le moindre suspect. Ils cheminèrent ainsi de longues heures durant, ne s'arrêtant que rarement. Les équidés de tête donnaient le rythme tandis que le paysage se faisant changeant. Tantôt forestier, tantôt champêtre. En fin d'après midi, ils arrivèrent sûr les lieux d'une petite garnison en faction.

_ Des bandits dans l'coin ? demanda l'un des pictes.
_ Paraît qu'ils sont plus bas dans la forêt, on a retrouvé les traces d'un campement au croisement des corbeaux, répondit le soldat alors qu'il regardait la troupe.

Athala qui était resté à bonne distance du reste de la troupe, observant les environs, détaillant le paysage avec attention. Assurément, ce n'était pas un des meilleurs endroits pour des voleurs, il fallait poursuivre leur route. Sitôt les hommes se remirent en chemin, scrutant la route qui devait les mener au croisement. La picte adressa un regard au jeune homme à ces côtés « Tu sais où sont les herbes qu'a demandé Gaius ? » décrocha-t-elle enfin après avoir été silencieuse pendant si longtemps.

Aussitôt fut-il en scelle, les pictes décidèrent de partir. S’il avait l’air un peu trop sérieux, il était surtout frustré que Gaius ait de si mauvaises idées. À la limite, il aurait pu partir seul et s’en sortir sans trop de difficulté. Avec les calédoniens, il avait surtout l’impression de déranger. Mais il y avait au moins un avantage à cette histoire. Il pouvait ainsi voir si la princesse Athala allait utiliser cette lance qu’elle possédait.

En effet, Merlin se souvenait de ce fameux jour froid où les calédoniens s’étaient présentés à Uther pour une alliance. Merlin avait pu sentir la magie émanant de la lance, aussi bien qu’il la ressentait aujourd’hui. Deux hypothèses s’offraient donc à Merlin. Soit la princesse se servait de magie, soit elle ignorait que sa lance était magique, mais cette dernière hypothèse semblait plutôt invraisemblable. Restait plus que la première.

Jusqu’ici, la picte n’avait pas semblée être une ennemie, ce qui rassurait le magicien qui n’avait pas non plus envie de la suivre et la surveiller, surtout en sachant que celle-ci le repèrerait probablement facilement. Surveiller une picte n’allait certainement pas être aussi facile que de surveiller et espionner Morgane, et il fallait dire que c’était surtout cette dernière sa principale préoccupation. Et dire qu’il avait laissé Arthur au château avec cette sorcière…

À un certain moment du trajet, les pictes se replacèrent et Merlin dû se placer près d’Athala dans les rangs, laissant les autres passer devant eux. C’était une position étrange à ses yeux, ayant l’habitude qu’Arthur prenne les devant en temps normal. C’est en fin d’après-midi, alors qu’il commençait à peine à avoir mal au derrière, qu’ils s’arrêtèrent enfin, mais ce fut si court comme arrêt que Merlin ne put descendre de cheval vraiment. Lorsqu’ils reprirent la route, Merlin regarda autour le site. Il avait déjà un mauvais pressentiment. C’est alors que la calédonienne s’adressa à lui, sans doute pour la première fois de sa vie.

- Gaius m’a simplement dit que j’en trouverais près des côtes. Je n’en sais pas plus.

C’était toujours comme ça avec Gaius de toute façon quand Merlin devait aller chercher une herbe. Et comme il était toujours chanceux, il pouvait se risquer à supposer qu’il trouverait les herbes sur le site même où les bandits se trouveraient.

- Il m’a cependant laissé son livre pour que j’en aie une image.

Une brise légère s'était levée, apportant avec elle diverses odeurs végétales. Le fond de l'air était frais et annonçait une nuit plus fraîche encore. Les vents venaient du nord-est, amenant avec eux quelques nuages sombres qui laissaient à penser que le temps ne serait pas au beau fixe. Athala voyait tout cela mais n'en disait rien. C'était un bon temps et une avantage dont il fallait profiter.

Le croisement aux corbeaux était encore à une centaine de lieux d'ici, sur la route de Dorchester. Pour l'heure ils n'avaient croisé que peu de monde sur Portway, ce qui avait permis à la picte d'enfin daigner desserrer la mâchoire. Les autres restaient beaucoup plus en avant, parfois on ne voyait que l'arrière train des derniers chevaux. Apparemment le jeune serviteur n'en savait pas plus quant aux plantes qu'il devait trouver. Toutefois, il fit mention d'un livre dans lequel il était possible de se référer pour trouver les dites plantes. Athala s'était contenter d'arquer un sourcil, davantage par lassitude que par surprise. La princesse arborait depuis quelques temps déjà un air désabusé. Bien que dans le fond il avait toujours été difficile de la surprendre. « Je peux ? » demanda-t-elle avec fermeté et froideur. Elle tenait à voir à quoi pouvait ressembler ces herbes curatives, avec un peu de chance à deux ils pourraient aller plus vite une fois qu'ils se seraient occupés des bandits. D'ailleurs il fallait qu'elle réfléchisse à ce qu'elle allait faire du serviteur avant qu'ils n'aillent s'occuper de problème...

Tendant la main, Athala attendait que Merlin lui donne le livre en lui indiquant la bonne page. Ce temps là, elle réfléchissait déjà la stratégie qu'ils allaient devoir adopter. Uther avait été clair... Il ne voulait pas de prisonniers. Le mieux serait d'attaquer de nuit pendant que les bougres se penseraient à l'abri. Une frappe éclaire pour ne pas leur laisser le temps de chercher les armes. Quant au butin qu'ils auraient sans doute amassé... Il faudrait certainement l'amener à Dorchester auprès de la garnison en poste. Il leur faudrait bien trois jours pour s'occuper de tout ça et rentrer à Camelot.

Là, un vole de corneilles qui fuyaient le mauvais temps entrain de s'en venir. Les chevaux aussi semblaient l'avoir senti mais il en fallait plus pour s'inquiéter. Quoi que la monture du jeune homme semblait prêter un peu trop attention aux oiseaux qui passaient au dessus de leurs têtes. La monture d'Athala eût tôt fait de piaffer pour le rappeler à l'ordre.

Si Gaius avait laissé une carte à Merlin avec un endroit précis de marqué dessus, il aurait sans doute été plus facile pour lui de trouver les plantes dont il avait besoin. Mais il n’en était rien. Tout ce qu’il avait, c’était un vieux livre que Gaius avait sans doute fait lui-même dans son jeune temps, quand il étudiait la magie. En y pensant bien, les nombreux livres que Gaius possédaient était tous très intéressants. Pourtant, Merlin n’y avait jamais vraiment porté de grand intérêt, chose qu’il devrait sans doute faire. Si déjà il possédait de grands pouvoirs, sans doute serait-il encore plus fort avec toutes les connaissances de Gaius. Enfin, l’heure n’était pas à s’égarer dans ses pensées.

Non, car en regardant bien en avant, il ne voyait plus que le derrière des derniers chevaux devant eux. Les autres étaient encore plus loin. Il était donc seul avec la princesse Athala, ce qui était inquiétant. Il savait qu’elle utilisait la magie, mais ne connaissait pas l’étendue de ses pouvoirs, et il n’était pas assez bête pour la sous-estimer. C’était une picte après tout, et une de haut rang. Bref, quand elle lui demanda le livre, il le sortit de son sac et le tendit à Athala, à la bonne page. C'était une bonne idée après tout, car si elle en voyait avant lui, elle n'aurait qu'à le lui dire, question d'économiser du temps et rentrer à Camelot le plus vite possible et ne plus laisser Arthur seul avec Morgane. Il fallait dire aussi qu'il avait hâte que ce voyage se termine...

Quand il eut donné le livre à la princesse, une envolée de corneilles se fit entendre et voir. Les chevaux le ressentirent aussi. Du moins, celui de Merlin qui avait sans doute eu aussi peur que lui. Au fond, ils se ressemblaient tous les deux. Celui d’Athala ressemblait à celle-ci également, car c’est lui qui ramena le sien à l’ordre. Si Merlin avait eu le cœur à rire, il aurait sans doute ri. Mais l’heure ne se prêtait pas à la rigolade. Ce n’était jamais le moment quand on était près des pictes.

Avaient-ils simplement déjà ri ?

Athala feuilleta le livre rapidement avant de retourner à la page que lui avait indiqué le jeune homme. Les dessins étaient assez précis et l'ouvrage indiquait précisément les lieux où l'on pouvait trouver les plantes recherchés, sans toutefois donner de véritable repères géographiques. La pictes lisait avec attention le descriptif, notant dans un coin de sa tête les choses qui pouvaient lui être utiles le moment venu. Dans son jeune âge, elle aurait été ravis de pouvoir en apprendre davantage sur les plantes médicinales, malheureusement pour elle ce n'était pas un métier qui lui était destiné.

Elle fini par fermer le livre et le rendre à Merlin, profitant de ce moment pour l'observer un peu tandis que les autres avaient pris le large. Il avait certes un air idiot et connaissait davantage le confort d'une maison ou d'un château, il n'en demeurait pas moins curieux et attentif. Athala savait qu'il devait se poser de nombreuses questions et qu'il en avait voulu à Gaius de l'avoir embarqué dans cette aventure. Mais pour l'heure les pictes n'avaient ni chahuté, ni insulté le jeune homme. Ce qui devait le changer grandement de ses sortis avec le prince Arthur. Quelqu'un d'autre que la princesse aurait surement tenté de le rassurer et de lui laisser comprendre qu'ils étaient dans le même camp, mais à quoi bon ?

Athala talonna sa monture pour la faire aller au trot le jour commençait à décliner et il faudra aller vite. « Nous quittons la route, tâches de me suivre » dit-elle alors qu'à l'habitude elle n'aurait dit mot. Il fallait bien faire quelques efforts pour les gens qui n'étaient pas habituer à leur mode de fonctionnement. Sitôt sa monture quitta la grande route pour s'aventurer dans un champ en jachère prenant déjà le galop car ravis à l'idée de quitter la monotonie du vieux pavé romain. Ils filèrent à travers champs au petit galop avant de rejoindre la forêt alors que sur l'horizon le soleil déclinait à présent dangereusement. Depuis qu'ils avaient quitté le château, nul n'avait pris le temps de s'arrêter pour manger, les estomacs se faisaient vide mais Athala en avait l'habitude, ce qui ne devait pas être le cas de certains... Surtout d'une personne. Aussi, alors qu'ils n'étaient plus que deux sans savoir où était le reste de la troupe, la princesse fini par s'arrêter près d'un ruisseau, sautant de sa scelle pour laisser boire son cheval, lançant après coup un regard au serviteur de prince Arthur pour voir dans quel était il était après cette cavalcade hors des sentier battus.

Merlin regarda la princesse feuilleter son livre puis regarder la page qu’il lui avait indiquer. Sans doute voulait-elle se renseigner sur la plante et avec un peu de chance, peut-être saurait-elle où en trouver. Après tout, elle était bien plus habituée à la forêt que lui. Peut-être même la connaissait déjà-t-elle mieux que lui depuis le temps. Bref, il reprit le livre et le rangea. Ils se remirent ensuite en route sans mot dire. Certes, ils n’avaient rien à se dire. Certes, il n’avait reçu aucune insulte, mais il fallait dire que celles d’Arthur lui manquait au moins, et puis ça lui permettait de répliquer et ainsi entendre sa propre voix. Il ne l’avait presque pas entendu depuis les quelques dernières heures et elle lui manquait un peu, il fallait le dire.

Athala prit alors la parole pour lui demander de la suivre dans la forêt. Au moins, elle le lui avait indiqué. Il ne faisait pas partie de sa meute alors il fallait bien qu’ils s’adaptent l’un à l’autre. Bref, tournant dans la forêt, Merlin tâcha de suivre la picte, malgré le fait que son cheval avait un peu moins l’habitude de quitter les sentiers que la monture calédonienne. Après l’avoir perdue de vue, il la retrouva bien assez vite, déjà descendue de sa monture, auprès d’un ruisseau. Enfin ! Le cheval n’était pas le seul à être épuisé. Et ils avaient faim, tous les deux ! Merlin mit enfin pieds à terre, sentant des fourmis dans ses jambes. Il s’étira les jambes et les deux bras, se sentant mieux à terre que sur son cheval. Son derrière aussi en était ravie ! Laissant son cheval boire de l’eau, il regarda autour. « On va s’installer ici pour la nuit ? Les autres vont nous rejoindre ? Dois-je faire un feu ? » Sans doute était-ce stupide comme questions, mais il préférait les poser puisque son mode de fonctionnait était loin de celui d’Arthur. En effet, s’il avait posé la question au prince, il se serait pris une tape derrière la tête, ou encore un commentaire du genre « tu fais des progrès Merlin ! » Il fallait dire qu'entendre sa voix lui faisait du bien. Se raclant la gorge un peu, il attendit une réponse qui ne viendrait peut-être même pas. Il espérait néanmoins pouvoir s'asseoir pour manger un bon repas chaud, près d'un bon feu.

Ils étaient à présent en pleine forêt, loin de la grande route qu'ils avaient suivit des heures durant depuis leur départ de Camelot. Ici il ne semblait plus y avoir aucune trace d'activité humaine. On entendait que le bruit de la nature et le chant du ruisseau. Le serviteur du prince n'avait pas mis bien longtemps à la rejoindre tandis qu'elle surveillait déjà les alentours pour s'assurer qu'ils n'étaient pas observés ou que d'autres se trouvaient dans les parages. A première vue rien. Merlin vint à demander ce qu'il devait faire et quel était le plan pour cette nuit. Athala lui lança simplement un regard avant reporter son attention sur les environs, toisant les arbres et les plantes sans y porter un quelconque intérêt. « Non » finit-elle par répondre après un long silence pesant comme il était de coutume chez elle de faire planer. « Les chevaux vont se reposer ici, il faut trouver un endroit pour les cacher et après on fini le chemin à pied. » Ainsi allait-il falloir trouver un lieu abrité où ils pourront y mettre les montures le temps de s'occuper de leur affaire. Les pictes allaient devoir attaquer de nuit pour prendre les bandits par surprise et s'assurer d'avoir l'avantage.

Athala pris la lance qu'elle avait attaché à la scelle de sa monture sur son flanc gauche, sitôt elle fit signe à Merlin de la suivre pour continuer à s'enfoncer dans la forêt à la recherche d'un endroit pour y abriter mes chevaux qui se tenaient tranquille au bord du ruisseau. Là n'était que le début du plan qui devait s'établir sur plusieurs jours. Aussi n'était-il pas temps de penser aux plantes que le jeune homme devait trouver, ils auraient bien assez de temps de se lancer dans cette aventure là. La princesse calédonienne était déjà à la recherche d'un abri, d'une cavité, d'une excavation où pourrait tenir deux chevaux pour plusieurs heures sans pouvoir attirer l'attention de braconniers ou des chasseurs. Le soleil continuait de décliner, n'offrant plus qu'une lumière douce et diffuse qui commençait à peiner à traverser la voûte végétale.

Non. Elle avait dit non. Si ça n’avait été que de ce silence qu’elle avait laissé planer, la question aurait été réglée. Malheureusement, il y avait autre chose. Sa réponse était simplement trop vague pour que Merlin comprenne ce qu’elle voulait dire. Non, ils n’allaient pas s’installer ici pour la nuit ? Non, les autres n’allaient pas les rejoindre ? Non, il ne devait pas faire de feu ? Toutes ces réponses ? C’était un peu dérangeant de ne pas savoir, mais Merlin n’en fit pas de cas. Il tenait à garder la tête sur les épaules. Ainsi, il ne posa pas plus de question. Elle avait dit non, alors il ne ferait rien… sauf bien sûr ce qu’elle disait.
Ainsi, elle affirma qu’ils devaient trouver un endroit pour cacher les chevaux avant de poursuivre leur route à pieds. Il la suivit donc dans la forêt, s’y enfonçant de plus en plus en tendant d’être le plus silencieux possible. Maladroit, il lui arrivait malheureusement de piler sur des brindilles un peu trop souvent. C’était raté s’ils voulaient être subtils.
Regardant malgré tout autour pour trouver un abri, il trouva une cavité dans la pierre parfaite, quelque chose de subtil qui saurait garder leur cheval. « Là, regardez. » Il pointa ainsi l’endroit. Il suffisait juste de savoir si la princesse était satisfaite ou pas. À son avis, c’était parfait. Depuis le temps, il commençait à se faire expert en matière de cachette, mais elle, elle avait l’âme d’un chasseur qu’il n’avait pas. Ainsi, si elle était d’un avis différent, il n’allait pas insister et tenter de trouver autre chose. En même temps, il ne connaissait pas vraiment le plan des pictes. Il ne pouvait donc pas vraiment deviner combien de temps ils avaient devant eux. Il ne pouvait pas non plus se fier au soleil, comme avec Arthur, se doutant bien que les pictes n’avaient aucun mal à se promener en forêt la nuit.

Une brise légère rappelait que la nuit allait être fraîche. Les branches des jeunes arbres s'agitaient sous ce souffle d'air irrégulier. Merlin était loin d'être un personnage discret, mais pour l'heure il n'était pas bien nécessaire de cacher leur présence. Après avoir arpenter un temps le sous-bois, le jeune homme avait potentiellement trouvé un endroit qui allait pouvoir convenir à leurs montures. Athala s'approcha lentement de l'endroit indiqué, étudiant l'endroit avec attention. « Cela devrait suffire pour qu'ils tiennent dedans, mais nous allons devoir cacher l'entrée. » Elle fit alors signe à Merlin d'aller chercher les chevaux qu'ils avaient laissé un peu plus loin. Pendant ce temps là, la picte allait confectionner rapidement une paroi végétale. A l'aide de branches, de lierres et d'un peu d'ingéniosité, elle était parvenu à donner l'impression qu'il s'agissait d'un mur végétale qui avait poussé sur la roche. Ne restait plus qu'à y mettre les chevaux avec de l'eau et un peu de nourriture, de quoi les tenir tranquille le temps qu'il faudrait. Le jour lui, continuait de décliner. Il en avait encore pour deux heures tout au plus avant que les derniers rayons du jour ne disparaissent complètement.

« Il faut effacer les traces des sabots » dit-elle en observant le sol de la forêt. Un bon chasseur pouvait voir avec facilité qu'il y avait eu de l'activité humaine et équine dans les parages. Prenant une branche morte avec de multiples ramifications semblable à un râteau, Athala commença à remuer les feuilles mortes de façon à faire croire que l'endroit n'avait pas été foulé. Au moins ils n'auraient pas à le faire demain matin. « Tu es prêt ? » demanda la princesse à l'adresse de son compagnon d'infortune. Il était temps de rejoindre les autres là où étaient supposés les voleurs qu'on les avait envoyé traqué. La nuit tombait sans demi mesure, plongeant la forêt dans un début d'obscurité. Les arbres ressemblaient à des fantômes enracinés dans la terre.

Oui, il était fier d’avoir trouvé une cachette pour les chevaux qui convenait aussi à la picte. Au moins, il n’avait pas trop l’impression d’être un complet imbécile aux yeux de la princesse. C’était déjà ça de gagner. C’était déjà ça de plus qu’avec Arthur… Bref, Athala lui demanda d’aller chercher les chevaux, ce qu’il fit sans poser de question. Quand il revint, la princesse avait déjà confectionné une paroi fort crédible pour cacher l’entrée de la cachette.

Une fois les chevaux nourris et cachés, la louve fit remarquer qu’ils devaient effacer leurs traces. Elle avait raison. Il l’avait fait souvent avec Arthur, ainsi, il prit une branche semblable à cette de la princesse et effaça des traces de pas de son côté aussi. Maintenant, personne ne pouvait remarquer que la terre avait été piétinée par des chevaux, ou des humains. Comme le soleil allait se coucher bientôt, il leur fallait partir. Ignorant toujours le plan d’attaque, Merlin se dit qu’il serait peut-être temps de le demander, avant qu’ils n’arrivent à destination et qu’il ne fasse tout foirer.

Mais avant qu’il puisse parler, Athala lui demanda s’il était prêt. « Oui, je vous suis. » Il n’avait que ça à faire de toute façon, non ? Alors ils se mirent en route, restant toujours hors des sentiers de la forêt. C’est après quelques minutes de marche qu’il osa prendre la parole. « Puis-je vous demander quel est le plan ? Je ne voudrais pas le ruiner sans le vouloir. » Car il était doué pour ça. Fallait simplement demander à Arthur pour qu’il approuve.

La nuit s'annonçait fraîche et longue. Il n'était pas temps de traîner. Or Merlin venait de soulever un point important auquel Athala se devait de répondre. Elle n'aimait certes pas le valet du prince, mais elle se devait de lui éviter le trépas ou au moins de gâcher cette chasse qui s'annonçait déjà bien compliqué. Tant qu'il y avait encore de la lumière, elle lui fit signe de le suivre, il leur faudrait causer en marchant, pour le moment aucune âme vagabonde ne pouvait les surprendre en un lieu pareil. Le commun des mortels vivait au rythme de l'astre solaire.

« Nous avons encore deux heures de marche devant nous. Tu comprendras bientôt pourquoi nous ne pouvons pas prendre les chevaux. Une fois sur place, nous retrouverons les autres. Il te faudra rester en retrait et quoi que tu entendes, tu ne devrais pas bouger de ta place » dit-elle d'une voix calme et basse qui inspirait plus de quiétude que de terreur. « Je sais que tu ne comprends pas notre façon de faire et que notre peuple semble être seulement fait pour la guerre. Mais prends le temps d'écouter la nature et la vie qui y réside, tu réussiras sans doute à percevoir quelque chose qui t'apportera des réponses. » Comme à son habitude, la louve de Calédonie restait énigmatique, mais elle voulait surtout épargner au jeune homme la vision d'un massacre. Uther avait été clair sur le sujet, aucun prisonnier ne serait fait cette nuit car la justice était clair envers les déserteurs. Qu'importe le royaume, l'armée réservait la morte à ceux qui quittaient les rangs.

Lance en main, Athala s'enfonçait toujours un peu plus dans la forêt, tendant l'oreille tandis que ses yeux s’accommodaient à l'obscurité nocturne. « Restes bien près de moi » Sans doute était-ce la première fois que la princesse prenait vraiment le temps de dire les choses à Merlin, lui qu'elle avait si clairement ignoré la plus part du temps quand ils étaient à Camelot. Aujourd'hui elle tendait une main vers le valet pour ne plus avoir l'air d'une sauvage.

Suite au signe de la princesse, Merlin se mit à marcher pour la suivre. Ils avaient apparemment deux heures de marche à faire. Or, marcher ne l’embêtait pas vraiment. Il avait l’habitude de courir pour Arthur après tout. Et il courait très bien d’ailleurs quand il fallait qu’il sauve sa vie. Son instinct de survie était plus développé que celui d’un animal. Bon, sans doute pas, mais vous voyez le portrait… Ainsi, la princesse poursuivit en disant qu’ils allaient rejoindre les autres, mais qu’il allait devoir rester en retrait, sans bouger. Probablement qu’ils allaient faire leur travail sans qu’il n’ait à regarder ou aider. Si Arthur lui avait donné le même ordre, il aurait sans doute hoché la tête pour le faire taire, mais aurait désobéit une fois le moment venu. Or, cette fois, il jugeait qu’il valait mieux obéir. Il ne craignait pas pour la meute de la princesse. De toute façon, il n’avait jamais été dit dans les récits des druides, ou par Kilgharrah qu’il devait la protéger. Là n’était pas son destin. « Comme vous voulez. »

Athala reprit alors pour parler un peu à la façon du grand dragon. Ses paroles étaient étrangement énigmatiques. Apparemment, s’il écoutait la nature et ce qui y vivait, il aurait sans doute des réponses. Fronçant les sourcils de questionnement, il n’allait pas l’interroger ou mettre en doute ses paroles. Comme elle le disait, il ne comprenait pas vraiment son peuple, mais il voulait surtout garder sa tête. Néanmoins, ses dernières paroles lui donnèrent envie de comprendre un peu plus leur peuple et leurs coutumes. Elle venait de piquer sa curiosité. Bref, ils continuèrent à marcher, restant près d’elle comme elle l’ordonna.